Banque européenne d’investissement : un pas de plus vers la Banque du climat !
Tous les ans, le Parlement européen analyse les orientations de la Banque européenne d’investissement (BEI) et émet des recommandations pour que les prêts accordés soient alignés avec les objectifs politiques de l’Union européenne. Le rapport pour avis sur les activités de la BEI, proposé par David Cormand, a été adopté aujourd’hui par la Commission des Budgets— avec 30 voix pour, 2 contre et 2 abstentions.
En tant que rapporteur, David Cormand a fait de la protection du climat et de la biodiversité son objectif principal dans ce dossier. Il a voulu rappeler la nécessité que toutes les opérations de la banque soient réellement alignées sur la trajectoire de l’Accord de Paris, et a en ce sens émis des réserves sur les exceptions nouvellement adoptées par la BEI pour financer des entreprises qui n’auraient pas de plan crédible de décarbonation. Le rapport appelle donc à ce que ces exemptions soient exceptionnelles, temporaires, et solidement justifiées. Il est plus que discutable de continuer à financer les grandes compagnies des énergies fossiles, même pour des projets « verts » : ces entreprises doivent avant tout réorienter radicalement leurs investissements.
Toujours sur le sujet de l’énergie, le rapport insiste sur les projets d’hydrogène que la BEI sera amenée à soutenir et sur les caractéristiques indispensables pour que ceux-ci soient bénéfiques pour le climat : ne financer que de l’hydrogène issu d’énergies renouvelables, produites localement, et dont l’additionalité est assurée (c’est-à-dire une production spécifique pour l’hydrogène qui n’utilise pas les capacités existantes dédiées à la consommation directe).
Après les succès des rapports des années précédentes, la question de la condition animale a été de nouveau intégrée au texte. Il appelle notamment la BEI à s’aligner sur les standards des institutions financières multilatérales, à commencer par la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), qui exclut les pratiques telles que le gavage des canards et des oies et la détention d'animaux dans le but premier de produire de la fourrure ou toute activité impliquant la production de fourrure. David Cormand a voulu élargir les demandes pour inclure le cas de l’aquaculture, qui pose de sérieux enjeux en terme de condition animale et de risques environnementaux. Le texte final appelle ainsi à un strict respect des standards en ce sens, et en particulier à s’assurer de la durabilité de la nourriture utilisée dans les élevages aquacoles.
Le rapport aborde aussi les moyens financiers qui devront être mobilisés pour la reconstruction de l’Ukraine, et met l’accent sur les conséquences environnementales de la guerre menée par la Russie. David Cormand a notamment insisté pour flécher les fonds vers des projets durables, et pour que la société civile soit réellement partie prenante de ces projets. Ces demandes font écho à celles qui avaient été formulées par la délégation ukrainienne que David Cormand avait rencontré à Bruxelles en novembre 2022.
De nouveaux sujets ont été intégrés au rapport, dans le contexte de la recherche d’une autonomie stratégique pour l’UE : il est demandé à la BEI de prioriser les projets qui développeront l'économie circulaire pour les matières premières critiques, une approche fondée sur le recyclage et la réutilisation des matériaux, afin de réduire la dépendance de l'UE à l'égard des pays tiers.
Comme chaque année, David Cormand a également voulu souligner les faiblesses de la banque en matière de respect des droits humains et de transparence. Le rapport appelle donc à renforcer les mécanismes internes de lutte contre la fraude et la corruption, à améliorer la transparence et le contrôle des opérations intermédiées et à assurer un suivi une fois les projets lancés.
Maintenant que la commission des Budgets a adopté cet avis, il sera envoyé à la commission des Affaires économiques, afin de contribuer au rapport final.