Non, le numérique ne sera pas LA solution pour une transition verte
Le 24 novembre, en session plénière, David Cormand s’est exprimé sur le Path to a Digital Decade (« voie à suivre pour la décennie numérique »), un projet de la Commission européenne pour « mener à bien la transformation numérique de notre société et de notre économie d'ici à 2030 ». Pour David Cormand, la situation est claire : les contraintes de la crise environnementale ne sont pas assez prises en compte dans ce projet, qui veut toujours plus de numérique, plus vite, partout.
L’intervention de David Cormand 👇
Ce texte est l’expression parfaite de nos contradictions lorsque nous parlons de la double transition numérique et écologique.
Nous avons ici un texte qui donne nos objectifs numériques d’ici à 2030. Que 75% des entreprises utilisent le cloud, la big data ou l’intelligence artificielle. Que 90% des PME soient intensive en numérique. Doubler le nombre de licornes. Déployer la 5G partout.
Chacun de ces objectifs répète inlassablement le même programme : nous voulons plus de numérique, plus vite, et partout.
Ce à quoi ne répond pas ce texte, c’est pourquoi ces chiffres ? Et surtout, pour quels bénéfices ?
Si les études d’impacts sont obligatoires pour justifier la moindre règlementation sociale ou environnementale, lorsqu’on parle d’engager des milliards dans des investissements technologiques « IA, quantique 2.0 », elles sont facultatives.
La grande absente de ce texte, ce sont les contraintes de la crise environnementale.
Car si la transition écologique est, elle, un impératif pour éviter la catastrophe, la transition numérique n’est pas une fin en soi. Elle est un outil au service de nos intérêts. Pour ma part, je pense qu’elle devrait être guidée par nos objectifs sociaux et environnementaux. Pas au service d’une capitalisation de nos données personnelles et du profit de quelques entreprises, en Europe ou ailleurs.
Nous ne pouvons pas faire l'économie des impératifs écologiques dans nos politiques numériques et industrielles. Lier les transitions vertes et numériques, ce n'est pas répéter à l'envie que le numérique va être LA condition de réalisation de la transition verte, ou ajouter « durables » ou « neutre en carbone » dans un considérant. C'est calculer et regarder honnêtement l'impact environnemental du numérique et orienter nos décisions technologiques en fonction.
Nous sommes dans une situation de pénuries de ressources. Il est urgent de le reconnaitre et de commencer à agir de façon sobre et mesurer où nous souhaitons concentrer nos investissements et notre énergie.
Je nous appelle collectivement à sortir de la fuite en avant dans laquelle nous sommes. Nous pouvons développer un numérique durable et résilient pour le bien-être de tous et toute. Nous devons seulement nous en donner les moyens.