Mot de passe : Jadot.
Dans les dernières heures d'une campagne, les arguments se durcissent, frisant parfois l'anathème. Ce n'est pas l'esprit de cette note de blog.
J'écris les lignes qui suivent en espérant être utile aux personnes intéressées par le devenir écologique du monde, qui se demandent de bonne foi pour qui voter. Vous voulez que votre vote serve à défendre le climat, la biodiversité, l'harmonie avec le vivant ? Vous voulez protéger les océans et les montagnes, les forêts et les mangroves ? Vous voulez que la défense des écosystèmes l'emporte sur la rapacité d'un système prédateur qui broie les humains et détruit la nature ? Les choses sont simples. Votez pour les écologistes. Notre constance n'est plus à démontrer. Nos constats étaient justes. Il faut maintenant appliquer nos solutions.
Au fond chacun sait qui a depuis des années porté la question écologique. Ce sont les Verts. Nul ne saurait nous contester l'antériorité dans la compréhension des maux qui menacent notre planète. La catastrophe écologique en cours aurait pu être enrayée si nombre de celles et ceux qui prétendent aujourd'hui nous disputer la palme de l'écologie avaient été plus lucides parfois, et plus courageux toujours. Disant cela, je ne demande pas des décorations pour les anciens combattants de l'écologie, mais de la vigilance pour les temps présents. Car l'écologie appelle à un bouleversement de l'ordre des cosmogonies politiques établies. C’est en cela que chaque voix compte.
Le destin écologique de notre pays aurait été fort différent si les injonctions au « vote utile » n’avaient pas eu force de loi électorale pour un certain nombre de citoyennes et citoyens sincères qui pensaient faire un sacrifice utile en faveur de l’intérêt collectif en votant en fonction des sondages plutôt qu’en fonction de leurs convictions.
Il y a près de 50 ans, René Dumont avait recueilli bien peu de suffrages, en partie à cause, sans doute, du renoncement d’électrices et d’électeurs qui pensaient que leur suffrage compterait moins en faveur d’un « petit » candidat écologiste qu'en soutenant de « gros » candidats… Je pense que c’est tout le contraire. Toute voix compte. Elle compte lorsqu’elle exprime les convictions profondes que l’on a en nous. Et plus encore quand elle donne de la force à une pensée et une proposition politique émergente et essentielle comme celle de l’écologie. Nous n’en sommes plus à l’époque épique de René Dumont. L’écologie politique s’est affirmée. Elle n’est plus seulement aujourd’hui une force lanceuse d’alerte. Elle pèse, elle agit, elle dirige, parfois. Bref, elle fait ses preuves. C’est pourquoi elle est scrutée, enviée parfois, dénigrée aussi, copiée souvent. Et donc, chaque voix qui la renforce est décisive.
Ne vous laissez donc pas enfermer dans le storytelling des marchands d'illusion. Rien ne serait plus dangereux que de faire passer les vessies du statu quo pour les lanternes du changement. Hier on nous promettait que l'entrée en campagne de Christiane Taubira allait tout changer, et on nous demandait de sacrifier l'écologie sur l'autel de l'union de la gauche.
Aujourd'hui on nous affirme que Jean-Luc Mélenchon pourrait être au second tour et bousculer l'élection présidentielle en la remportant. Sur quoi s'appuie cette affirmation ? Sur des sondages qui indiquent une dynamique en faveur du candidat de la France Insoumise. Je note que depuis des mois la France Insoumise nous demande de ne pas croire aux sondages qu'elle renommait d'ailleurs horoscopes. A les écouter, il faudrait désormais les prendre au sérieux ? Cette versatilité fait réfléchir. Au passage, la « République des sondages » à laquelle cette campagne présidentielle a été réduite est l’un des marqueurs de la déshérence politique et idéologique de la gauche. S’y résoudre, c'est concéder déjà une défaite de la pensée, et abdiquer devant la difficulté de la bataille culturelle, qui seule peut à terme construire une majorité d’idées face aux droites.
Mais soit, allons au bout de l'hypothèse de la crédibilité avérée des sondages.
En est-il un, un seul qui nous indique que Jean Luc Mélenchon figurera au second tour ? Aucunement. Pire, l’injonction au « vote utile » revendiquée par La France Insoumise a pour effet principal de fédérer le vote d’extrême-droite en faveur de Marine Le Pen qui n’a jamais été aussi forte. Ainsi, l’écart entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ne cesse de grandir… Est-il un sondage, un seul, qui indique qu'en cas de présence miraculeuse au second tour, Jean-Luc Mélenchon battrait Emmanuel Macron ? Pas davantage.
Donc sur quoi se basent les affirmations des militantes et des militants de la France Insoumise ? Sur leur seule foi et sur leur espoir. C'est estimable. Mais je ne partage pas leur pronostic. Si je croyais un seul instant possible la victoire de jean Luc Mélenchon, je n'hésiterais pas à le dire. Mais elle est aujourd'hui une chimère qui obstrue la lucidité.
S'y référer comme à une perspective dont la probabilité ferait autorité est étrange. Voter avec le pistolet du vote utile sur la tempe, ne construira rien d'autre que de nouvelles désillusions. Chacune et chacun d'entre nous est libre de son vote et c'est heureux. Voir fleurir l'argument du vote utile blesse ma conception de la démocratie, car je ne tiens aucun vote pour inutile.
Et il me semble que même pour celles et ceux qui croient à l'argument du vote utile, le vote écologiste est le moins inutile de tous les votes. Pour une raison simple : il ouvre la voie d'un nouveau cycle politique qui ne serait pas basé sur la reconduction du triumvirat de la présidentielle de 2017, ni sur la répétition ad nauseam de la décomposition des forces anciennes.
Pour les années qui viennent, il faut que les écologistes jouent un rôle majeur, cardinal, dans la politique française. Pour cela, réaliser un bon score aux élections présidentielles et législatives est essentiel. Par votre vote de dimanche vous pouvez construire un courant d'écologie puissant dans le pays. Nous n'en aurons que plus de force pour combattre les lobbies, débusquer les contrevérités des climato-sceptiques, bousculer l'inertie des conservateurs assis sur une rente si confortable qu'ils entendent tout faire pour la préserver.
Toute la campagne durant, nous n'avons cessé de demander la transition écologique dans la justice sociale. Nous sommes les seul·e·s à avoir pris la mesure de la nouvelle donne géopolitique dont la guerre en Ukraine est l’un des symptômes, et ses conséquences en matière d'indépendance énergétique. Les écologistes demandent un embargo sur le gaz et le pétrole russes car nous savons que notre indépendance énergétique passe par la rupture avec les énergies fossiles et le régime climatique catastrophique qu'elles ont provoqué. Nous ne cédons pas devant les injonctions des garde-chiourmes des fossiles, et notre défense des droits humains est universelle. Nous ne remettons pas à plus tard la transition écologique et c’est pourquoi nous ne fléchissons pas face à Total dont nous sommes les seuls à demander le départ de Russie.
Les arguments vont continuer à tourner dans nos têtes et dans les conversations réelles ou virtuelles pendant les quelques heures qui nous séparent du scrutin, c'est le jeu de la démocratie. Il faut donc jusque dans les derniers instants parler à la fois aux cœurs et aux cerveaux pour s’adresser aux mains qui glisseront un bulletin dans l’urne.
A toutes celles et tous ceux qui ont la volonté de faire avancer la cause de l'écologie, je répète cette consigne simple non comme on donne un ordre, mais bien plutôt comme on partage le mot de passe d'un futur meilleur : dimanche, votez et faites voter pour le candidat de l'écologie, Yannick Jadot.