Nos forêts sont en danger

La semaine dernière, l’ONF a dû procéder à la coupe de 450 arbres dans la forêt d’Eu, sur le territoire d’Incheville en Normandie.

Les arbres étaient malades, touchés par un parasite, le puceron vert. Quelques individus étaient également touchés par les scolytes, des insectes qui font mourir les arbres en moins de deux mois.

La forêt avait déjà été touchée en février 2022 par la tempête Eunice qui avait provoqué la chute d’une centaine d’arbres.

L’exemple de cette forêt normande est malheureusement loin d’être isolé.

Partout en France, et plus largement en Europe, la forêt est malade.

Elle subit des sécheresses répétées, les attaques d’insectes ravageurs, des champignons ou autres parasites.

C’est le « double effet Kiss Cool » : des forêts considérablement fragilisées par le dérèglement climatique brutal qui les percute, combiné à une industrialisation de leur exploitation qui méprise le long terme et l’anticipation au bénéfice de profits à court terme. 

L’ONF estime qu’en 2019 plus de 218.305 hectares de forêt publique étaient touchés par le dépérissement sachant que les trois-quarts de la surface forestière totale sont privés. 

En 10 ans, la mortalité forestière s’est accrue de 35 %, représentant la perte de 10 millions de m³.

La forêt est toujours en croissance nette en dépit de la mortalité et des prélèvements de l’industrie du bois (50 millions de m³ par an), puisque sa croissance naturelle demeure à plus de 88 millions de m³ par an.

Cependant, c’est une croissance en trompe-l’œil.

Si nous ne réagissons pas rapidement, nos forêts vont mourir.

La situation est d’autant plus dramatique, que la forêt joue un rôle vital dans la lutte contre le dérèglement climatique en absorbant chaque année plus de 80 millions de tonnes de CO2 via la photosynthèse.

Elle est aussi une « régulatrice » de température et d’humidité. Et elle est, si elle n’est pas artificialisée par une surexploitation, un espace de biodiversité particulièrement riche et précieux.

Pour éviter la catastrophe, il faut repenser les politiques publiques en faveur de la forêt. Bien qu’utile, l’action de l’Europe se limite à lutter contre les importations de bois illégaux, se reposant sur les Etats pour la lutte contre le dérèglement climatique.

En France, jusqu’à présent la priorité était accordée à la fonction de production sur les autres fonctions environnementales de la forêt. Il faut que cela cesse, les fonctions environnementales doivent redevenir la priorité de la politique forestière avec des moyens considérablement accrus.

En effet, aujourd’hui la politique forestière, avec moins de 280 millions d’euros par an, ne représente que 0,3 % du budget de l’État alors que nos forêts s’étendent sur 31 % du territoire national. Ce montant est également dérisoire si on le compare aux plus de 9 milliards consacrés à l’agriculture pour l’essentiel chimique et au profit des plus gros producteurs.

Si l’État n’agit pas maintenant, il sera bientôt trop tard.

Il faut des dizaines d’années pour faire pousser un arbre. Si nous attendons trop pour agir, nos forêts auront atteint un point de non-retour qui les condamnera à devenir des déserts végétaux.


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