Ferme de Bonsecours : mobilisation citoyenne pour préserver la (les) Terre(s)…
On l’oublie souvent, mais l’enjeu de préservation de la biodiversité est tout aussi important que celui du climat.
La principale menace qui pèse sur elle, en plus des pratiques agricoles nocives (chimie, remembrement, élevage et cultures intensives, …) est la tendance bien française à construire sur les espaces naturels plutôt que de réhabiliter le parc de logement ancien ou de résorber les nombreuses friches industrielles et urbaines.
La commune de Bonsecours illustre parfaitement cette tendance néfaste.
Située à l’entrée des plateaux Est de Rouen, elle a la chance de conserver une ancienne ferme agricole à proximité de la magnifique Basilique de Bonsecours et de la Mairie.
Autant le dire, une opportunité rare en milieu urbain. Une chance d’offrir aux habitants un cadre de vie exceptionnel qui fait malheureusement souvent défaut et explique la tendance française à l’étalement urbain en zone rurale.
Malheureusement, ce n’est pas l’approche de la Mairie de Bonsecours qui perçoit ce poumon vert comme une opportunité de construire toujours plus de logements au prix de la bétonisation de 22 hectares, de la création d’un îlot de chaleur et de l’aggravation des problèmes de circulation.
Ce n’est pas moins de 360 logements que la Mairie et le prometteur veulent construire alors que la ville compte un peu moins de 6.500 habitants.
C’est une ambition démesurée, pour ne pas dire absurde, qui n’est pas sans rappeler la frénésie immobilière des « Trente Glorieuses » mais en totale décalage avec les attentes et les besoins de notre siècle.
D’ailleurs ce projet est ancien, puisque c’est en juillet 2007 que la Mairie avait décidé « d’aménager » le site de la ferme et la Maison Diocésaine proche dans le cadre d’une ZAC, zone d’aménagement concertée.
Heureusement, la Mairie n’est pas le seul acteur public à décider puisqu’avec la création de la Métropole, la compétence d’urbanisme lui a été transférée.
Dans le cadre de l’élaboration de son nouveau Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), la Métropole a mis un coup d’arrêt au projet en changement son classement administratif en « 2AU » empêchant la réalisation du projet.
Plutôt que de respecter le choix démocratique du Conseil métropolitain, la ville et les propriétaires du site ont attaqué la décision au tribunal administratif en juillet 2021 puis en appel en février 2022, toujours en délibéré.
Ce dossier illustre le drame de notre siècle. D’un côté, des élus et des intérêts économiques aveuglés par le mythe de la croissance à tout prix, de l’autre, une population qui se mobilise au sein de collectif pour préserver leur cadre de vie et le capital de biodiversité qu’ils souhaitent transmettre aux générations futures.
Le cas de Bonsecours est à la fois désespérant et plein d’espérance.
Désespérant de voir l’aveuglement des élites du passé ;
Porteur d’espoir quand l’action de quelques centaines de citoyens est capable d’arrêt l’inéluctable processus de destruction des espaces naturels tout en étant force de proposition.
L’Association de protection de la ferme de Bonsecours (APFB) qui s’est mobilisée contre le projet n’est pas constituée de ce qu’on appelle des NimB (Not in my backyard) : des gens se contenteraient de s’opposer sans rien proposer en retour. Bien au contraire.
Sur la partie déjà urbanisée ils proposent de réhabiliter la Maison Diocésaine qui permettrait de réaliser un tiers du programme de logements prévu par le promoteur, bien suffisant au regard de la population de la commune.
Sur la partie agricole, ils proposent de réaliser une ferme urbaine (👉) qui permettrait à la fois de préserver cet espace naturel rare, de créer un lieu de sociabilité et d’éducation à l’environnement.
La leçon que je retiens de cette affaire est que notre capacité collective à sauver la Planète et à préserver des conditions de vie acceptables pour l’Humanité reposera autant sur des collectifs citoyens que sur des pouvoirs publics trop souvent empêtrés dans leurs contradictions et qui continuent à se tromper de contraintes et ainsi réfléchir avec le logiciel du siècle passé.
De ce point de vue, les conditions d’attribution des dotations globales de fonctionnement octroyées aux communes (et qui alimentent leurs budgets) doivent évoluer et prendre davantage en compte la préservation des espaces agricoles et naturels et non pas encourager à l’urbanisation et à l’augmentation de la population.
Les logiques « expansionnistes » qui encouragent l’urbanisation doivent être inversées pour à la fois garantir la préservation des sols et des cadres de vie tout en permettant aux petites et moyennes communes d’envisager leur développement autrement que par l’artificialisation des sols.
Plus d’informations sur la page Facebook de l’Association de protection de la ferme de Bonsecours (APFB) : https://www.facebook.com/fermedebonsecours