La Manche n’est pas la poubelle nucléaire d’EDF

Lors de la campagne présidentielle, le candidat Macron avait annoncé un vaste programme de relance du nucléaire avec le prolongement de la durée de vie du parc existant, le développement des mini centrales nucléaires et la construction de 14 EPR d’ici à 2050.

Je m’étais déjà exprimé sur l’absurdité de poursuivre cette fuite en avant du nucléaire au moment où les réacteurs tombent en panne les uns après les autres. Par ailleurs il est maintenant avéré que l’électricité nucléaire coûtera au minimum deux fois plus cher que l’électricité d’origine renouvelable.

Et oui, on n’arrête pas le progrès. Il est des technologies qui dans l’histoire peuvent paraître performantes, mais qui finissent par devenir obsolètes.

Les faits sont les faits.

Le nucléaire ne répond plus — mais l’a-t-il jamais fait ? — aux promesses initiales qui étaient les siennes. Les externalités négatives qu’il entraîne et la lourdeur technologique, logistique, industrielle qu’implique tout le process de cette filière dépasse de loin les avantages que d’aucuns continuent à vanter pour tenter de continuer à l’imposer :

« Non carboné » ? Les renouvelables le sont autant sinon plus en étant moins chers et la sobriété l’est bien d’avantage et bien meilleur marché également.

« Pilotable » ? Sincèrement ? Lorsqu’on voit les déboires du parc français vieillissant qui entraîne la fermeture simultanée des réacteurs, et cela de plus en plus fréquemment et de plus en plus longtemps… Et lorsqu’on voit les retards et les surcoûts abyssaux des réacteurs dit « de nouvelle génération », révélant un fiasco industriel et technologique…

Fiable et « pilotable », le nucléaire ? Sur le papier. Peut-être. Mais le réel, lui, ne ment pas. Et il nous instruit quand on s’y cogne. Or, la filière nucléaire a depuis un moment percuté le mur de ses limites…

Mais laissons cela de côté, même s’il faut toujours l’avoir à l’esprit. Car si elle est inoffensive, après tout, une technologie peut continuer à été soutenue pour des raisons politiques et pour l’intérêt de quelques lobbys… C’est honteux mais ce ne serait pas la première fois. Une telle gabegie d’argent public dans la situation actuelle est un crime, bien entendu. Mais il y a pire dans ce qui me révolte et arme donc ma détermination vis à vis de l’éléphant blanc nucléaire : le cœur du sujet reste la sécurité, des centrales bien sûr, mais aussi des déchets nucléaires.

La Normandie accueille depuis 1966 à la Hague le centre du traitement du combustible nucléaire usé qui comprend entre autres un lieu de stockage temporaire de MOX dans des piscines afin de permettre le refroidissement du combustible.

Face à l’enlisement du projet de stockage ultime des déchets nucléaires, EDF veut accroître la capacité de stockage actuelle de 12.350 tonnes à 18.850 tonnes (+6.500 tonnes) en créant d’ici à 2034 une nouvelle piscine. Son coût estimé, avant dépassement budgétaire, est de 1,25 milliards d’euros.

Le débat public officiel est actuellement suspendu en raison de la campagne électorale, mais je tenais à rappeler la position de notre Ministre de l’environnement, madame Barbara Pompili.

En 2018, elle s’exprimait en tant que députée LREM en défaveur du projet estimant qu’il fallait « continuer de s’interroger sur la nécessité d’(y) construire à grand frais une piscine centralisée dotée de deux bassins ayant pratiquement chacun la taille d’un terrain de football »

Loin de moi l’idée de blâmer Barbara Pompilli dont je juge certes sévèrement le ralliement à François Hollande à la fin de l’avant-dernier mandat, puis à Emmanuel Macron au suivant. Ce n’est pas elle qui est spécifiquement la cause du problème et je sais qu’elle demeure sans doute opposée au nucléaire pour toutes les excellentes raisons rappelées plus haut et bien d’autres…

Non, le problème n’est pas la Ministre. Cet épisode est juste l’illustration qu’en France c’est EDF qui décide de la politique énergétique et non la Ministre de l’environnement.

Emmanuel Macron doit cesser d’écouter les lobbys du nucléaire qui nous conduisent dans une double impasse, financière et sécuritaire et transforme le département de la Manche en poubelle nucléaire.

Le « quoiqu’il en coûte » ne saurait s’appliquer au nucléaire. Nos ressources financières ne sont pas illimitées. Comme dit plus haut, une transition juste implique la fin des dépenses inconsidérées pour servir les intérêts de quelques-uns.  Nos moyens humains, économiques, scientifiques, ouvriers, doivent être affectées à la réduction de nos consommations énergétiques, à la production des énergies renouvelables et à l’accompagnement social et professionnel des plus fragiles.

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